La stratégie du CERN consiste à faire en sorte que les déchets soient traités d’une manière sûre pour l’homme et l’environnement.
GESTION DES DÉCHETS CONVENTIONNELS
La plupart des déchets du CERN proviennent de ses activités scientifiques. Les déchets conventionnels du Laboratoire sont de trois types : déchets du campus, déchets industriels et déchets de chantier. Ces déchets sont eux-mêmes classés en déchets non dangereux (métaux, verre, PET, papier et carton, capsules de café, déchets biodégradables, déchets ménagers et équipements électriques ou électroniques - ces derniers étant soumis à contrôle selon la réglementation suisse OMoD) et en déchets dangereux (produits chimiques et leurs contenants, batteries, cartouches d’encre, ampoules et tout équipement ou matériau contaminé par des substances dangereuses). En 2021 et 2022, le CERN a éliminé respectivement 5 111 et 8 812 tonnes de déchets non dangereux et 1 544 et 1 295 tonnes de déchets dangereux (conventionnels ou radioactifs).
Le CERN dispose d’un système centralisé permettant de gérer la collecte et le transport des déchets du campus et des déchets industriels. Un inventaire des déchets quittant le CERN est également assuré, garantissant la traçabilité des filières d’élimination. Les déchets dangereux sont temporairement stockés dans une zone tampon, où ils sont collectés chaque semaine.
Le Laboratoire travaille avec des prestataires de services agréés pour l’élimination des déchets conventionnels autres que métalliques et électroniques, ces deux derniers types de déchets étant triés et vendus à des fins de recyclage. Le présent rapport ne tient pas compte des équipements en fin de vie repris, ou renvoyés au fournisseur, ni des déchets de chantier générés par les entreprises contractantes, qui gèrent elles-mêmes leur élimination conformément à la réglementation des États hôtes. Le CERN s’efforce d’améliorer constamment la traçabilité des déchets éliminés par ses entreprises contractantes.
RÉUTILISER ET RECYCLER
En 2021 et 2022, le CERN s’est attaché à améliorer son taux de recyclage des déchets non dangereux, qui représentent plus de 70 % des déchets générés. En 2022, ce taux était de 69 %, contre 56 % en 2018. Cette nette augmentation en 2022 est en partie liée à l’importante quantité de déchets métalliques recyclés à la suite du deuxième long arrêt (LS2). En outre, une filière de récupération, de reconditionnement et de vente d’équipements en bon état (notamment meubles, matériel informatique et équipements électroniques) a été créée.
Le projet-pilote de tri sélectif centralisé lancé en 2019 pour les déchets du campus a été élargi à d’autres bâtiments et ateliers, et à différents types de métaux. Aujourd’hui, il facilite le tri des déchets sur le lieu de travail. Si la quantité totale de déchets générés reste la même, le recyclage du papier et du PET s’est nettement amélioré.
Au CERN, la gestion des déchets est fondée sur le principe « réduire, réutiliser et recycler ». Dans ce domaine, l’Organisation a pour ambition de devenir un campus éco-exemplaire, en continuant à respecter pleinement les réglementations française et suisse applicables en matière de gestion et d’élimination des déchets. Une feuille de route consacrée à la gestion des déchets a été publiée en août 2022, ouvrant la voie à d’autres objectifs plus ciblés qui seront abordés dans de futurs rapports.
GESTION DES DÉCHETS RADIOACTIFS
Les activités scientifiques du CERN génèrent des déchets radioactifs, classés comme déchets dangereux, de faible et moyenne activité, produits par l’interaction entre les faisceaux de particules et les équipements présents à l’intérieur du complexe d’accélérateurs et des détecteurs. Les équipements activés par ce processus, tels que les absorbeurs de faisceaux (voir Pour aller plus loin) sont traités à la fin de leur cycle de vie comme des déchets radioactifs. Il s’agit, par exemple, d’éléments en métal, de câbles et de filtres de ventilation, ainsi que d’éléments potentiellement contaminés pendant des travaux de maintenance et d’amélioration (gants, combinaisons, etc.). En 2021 et 2022, le CERN a éliminé respectivement 307 et 519 tonnes de déchets radioactifs.
L’Organisation limite le plus possible la quantité de déchets radioactifs lors de la conception, de l’exploitation et de la mise hors service des accélérateurs, expériences et autres équipements, en réutilisant ou en recyclant les matériaux activés, tels que les éléments de blindage. En 2021, 2 077 tonnes d’acier, de fonte et de béton ont été réutilisées. En 2022, ce chiffre était de 906 tonnes. En outre, en 2021 et 2022, respectivement 259 et 135 tonnes de déchets radioactifs traités ont été réutilisés dans les installations du CERN.
L’équipe chargée de la radioprotection au CERN est chargée de contrôler et de catégoriser les déchets radioactifs. Ceux- ci sont traités dans une installation spéciale où ils sont triés, compressés et emballés conformément aux normes de traitement et d’élimination applicables. Avant d’être éliminés, les déchets radioactifs sont stockés temporairement dans une zone spéciale.
COLLABORATION AVEC LES ÉTATS HÔTES
La gestion des déchets radioactifs a toujours été une priorité pour le CERN. Elle est régie par l’accord tripartite relatif à la protection contre les rayonnements ionisants et la sûreté des installations du CERN, signé avec les autorités des États hôtes (voir Approche managériale).
Les déchets radioactifs du CERN sont éliminés via les filières agréées suisse et française. En Suisse, le CERN a recours à la procédure de libération, qui consiste à traiter comme des déchets conventionnels traçables les déchets dont il est démontré qu’ils ne relèvent plus de la catégorie « radioactifs » selon l’ordonnance suisse sur la radioprotection (ORaP).
PARTAGE ÉQUITABLE
Si la France et la Suisse ont des approches différentes de la gestion et de l’élimination des déchets radioactifs, l’accord tripartite requiert que le CERN optimise l’élimination de ses déchets radioactifs en choisissant la solution la plus appropriée pour chaque catégorie de déchets. Il prévoit également que les solutions retenues garantissent une répartition équitable des déchets entre les deux pays, principe dit de « partage équitable ». La mise en œuvre de ce principe a été revue en 2022 afin de tenir compte des enseignements de ces dix dernières années. La nouvelle procédure décrit dans quel pays et selon quelle filière devront être traités les différents types de déchets. Elle permet également de mesurer plus facilement la part assumée par chacun des deux États. Cette répartition est contrôlée grâce à trois indicateurs : le volume de déchets éliminés, leur radiotoxicité et les coûts de l’élimination. Ces indicateurs seront examinés lors des réunions annuelles plénières tripartites tenues avec les autorités des États hôtes.
POUR ALLER PLUS LOIN
Angelo Infantino est ingénieur nucléaire au sein du groupe Radioprotection du CERN.
— Le groupe Radioprotection a eu l’occasion d’intervenir dans les travaux de maintenance et d’amélioration du LS2. Pouvez-vous nous en dire plus sur le projet d’autopsie du cœur d’un absorbeur du LHC ?
AI : Un absorbeur de faisceau est un dispositif conçu pour absorber l’énergie des particules une fois qu’elles ne sont plus utiles pour la recherche scientifique. Avec le temps, l’absorbeur devient radioactif. Le projet d’autopsie du cœur d’un absorbeur du LHC, entrepris pendant le LS2, a nécessité une opération inédite : le démontage des deux absorbeurs de faisceau du LHC, situés au point 6, pour les rénover en vue de la troisième période d’exploitation. Cette intervention longue et complexe a permis aux équipes de collecter des informations cruciales, nécessaires pour l’utilisation de cet équipement pendant la troisième période d’exploitation et pour la conception de la future génération d’absorbeurs de faisceau pour le LHC à haute luminosité.
— Quelles ont été les principales difficultés de cette opération ?
AI : Les deux principales difficultés du projet ont été de retirer les absorbeurs de l’accélérateur et de les préparer en vue de leur élimination en tant que déchets radioactifs.
L’absorbeur de faisceau retenu pour l’autopsie a été découpé en morceaux, ce qui nous a permis d’inspecter l’état des disques de graphite qu’il contenait. Les absorbeurs de faisceau font aussi partie des premiers éléments de la catégorie « déchets radioactifs de faible et moyenne activité », qui contiennent des nucléides à demi-vie courte (FMA-VC). Cette catégorie donnera lieu à de nouvelles filières d’élimination spécialisées, pour lesquelles des discussions sont en cours entre le CERN et les autorités françaises. L’ANDRA, l’agence française de gestion des déchets radioactifs, a visité le chantier du CERN afin de s’informer et de mieux comprendre les propriétés de ce type de déchets et le traitement qui en est fait.
— Pourquoi ce projet était-il important ?
AI : Ce projet comportait deux volets : le volet autopsie, qui a permis d’obtenir des informations cruciales pour la conception des futurs absorbeurs de faisceau, et le volet traitement des déchets. Il a permis de réaliser des économies considérables en termes de temps, de ressources et de doses. Ce projet a été une grande réussite, les équipes du CERN ayant été à la hauteur du défi.
Encore plus
Les questions relatives au présent rapport peuvent être adressées à : environment.report@cern.ch.